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Du 08 juillet au 14 octobre 2012

Aurélie Slonina

Halles à charbon et site haut (plaine) // Montauban

Installations extérieures

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La nature est-elle soluble dans la culture? C’est sans doute l’idéal des grandes villes, tel qu’il s’incarne aujourd’hui dans les espaces verts, et le fantasme de ceux qui les conçoivent autant que de ceux qui les fréquentent: à défaut de s’éclater en pleine nature, les urbains s’inventent désormais des plaines de jeux qui font comme si. Car ces espaces verts aimeraient bien avoir l’air – l’air pur de la campagne, la campagne d’avant l’environnement – mais à y regarder de plus près, ils n’ont pas l’air du tout: ces jolis pans de verdure découpés, délimités, aménagés, synthétisés, engraissés, conditionnés sous atmosphère protectrice sont décidément trop verts pour être honnêtes. Bien sûr, ils nous dégoudronnent un peu la vie – cette vieille tige en fer blanc coulée dans du béton a bien besoin d’être dérouillée, de temps à autre – mais, surtout, ils nous renseignent sur nos projections d’un état de nature magnifié et sur notre insatiable volonté de domestication des choses, que le développement des moyens de maîtrise technique de tout ce qui pousse, grouille, croît et fleurit dans les interstices de notre existence bien réglée ne fait qu’exacerber. La savante Aurélie Slonina nous le rappelle avec malice: dans les Halles à charbon, ses Mauvaises herbes reproduisent, suivant un plan de jardin à la française du 17e siècle, un parterre de broderie dont la particularité est d’être entièrement composé de mauvaises herbes – des ronces, des orties, des pissenlits, des chiendents, des chardons et d’autres touffes de plantes inconnues auxquelles on ne prête d’ordinaire guère attention. «Une mauvaise herbe, c’est une herbe dont on n’a pas encore trouvé à quoi elle servait», notait Jules Renard à la fin du XIXe siècle. Il aura donc fallu attendre Aurélie Slonina pour qu’une réponse fleurisse comme un sourire naturel au coin des lèvres.
Enfin, sur la plaine qui domine le haut du site, un désodorisant monumental, libéré de son cadre domestique et de son usage sanitaire, achevait en beauté ce travail de dépollution de notre imaginaire accompli avec brio par l’artiste. Avec Fraîcheur végétale, c’en est bien fini de notre idéal de salon (des arts ménagés): il s’évapore purement et simplement dans la Nature.
François de Coninck